Je n’avais pas vu » Le prix du passage » de Thierry Binisti lors de sa sortie ,mais je l’ai vu sur Itunes et j’ai vu » Anti-squat » de Nicolas Filhol après une bonne critique du Figaro. » Le prix du passage » raconte comment une jeune femme habitant Calais fait passer des migrants en Angleterre dans le coffre de sa voiture, en utilisant le ferry, pour gagner de l’argent , puis par solidarité avec des migrants. » Anti -squat » de Nicolas Filhol raconte comment une jeune femme devient gestionnaire d’un immeuble de bureau où l’on héberge des personnes en situation de précarité pour éviter que l’immeuble ne soit squatté. » Le prix du passage » est plus humaniste. La jeune femme est humaine , elle entretient une relation d’amitié amoureuse avec un migrant cultivé qui fait face à des passeurs , trafiquants cruels. Le film se termine par un happy end. » Anti-squat » est plus dur. La jeune femme est soumise aux pressions des ses employeurs qui lui demandent de faire en sorte que les personnes hébergées, toutes précaires , ne restent pas dans l’immeuble ( je ne révèlerai pas sa décision ) . La dureté du monde social est forte. Tout le monde est en difficulté : la jeune femme , les personnes hébergées , même un manager cynique finit par être viré.
Les deux films représentent » la France d’en- bas » la France de la précarité . Les deux héroïnes sont au chômage ,ont du mal à trouver un travail , un logement , vivent dans des conditions précaires. L’héroïne d’ Anti-squat » a du mal à trouver un logement. Les fins du mois sont très difficiles d’où l’ aide aux passages de clandestins ou l’exploitation des personnes hébergées dans un immeuble .
Les films montre qu’il y a des personnes encore plus précaires. Ce sont les migrants qui vivent comme ils peuvent près des plages et sont victimes de passeurs requins et meurtriers. Ce sont les habitants de l’immeuble, tous en très grande précarité , ceux qui ne sont pas ressortissants de l’ UE ne sont pas acceptés ce qui exclut les migrants récents : femme enceinte , descendant d’ immigrés qui cherche à s’en sortir et à aider leur famille en étant chauffeur Uber. Les films montrent la précarité des jeunes femmes et celle de ceux qui sont encore plus précaires qu’elles : migrants , personnes occupant des emplois précaires. « .Anti squat montre la quasi impossibilité de se loger pour la jeune femme et les plus précaires. Il montre aussi la violence sociale ,la manière dont les propriétaires , ceux qui détiennent le pouvoir ( ici ceux qui gèrent la lutte contre le squat) les contrôlent , les utilisent à leur guise pour les faire partir avant la fin du contrat.
Ce sont ainsi des films qui montrent » la France d’en-bas » avec les difficultés à s’en sortir , mais aussi la lutte pour s’en sortir. Les films montrent avec leurs intrigues ,le désir de s’en sortir soit de manière illégale soit avec cynisme. Au delà des intrigues cinématographiques , on peut voir un portrait de la France de la précarité.
Les deux jeunes femmes élèvent seules leur fils . Dans » le prix du passage » , il s’agit d’un jeune garçon et sa mère fait passer des migrants clandestins d’abord pour pouvoir offrir à son fils une enfance matériellement plus facile . Dans » Anti- squat », plus révolté, plus radical , le fils est un adolescent révolté qui compose des chansons de rap ( très réussies) et qui participe aux blocages de son collège. Filhol est plus radical. Les deux films rendent hommage aux femmes qui élèvent seules leurs enfants ,évoquent les enfants comme soutien de leurs mères. Cet hommage rendu aux mères est tout à fait intéressant.
Au delà des intrigues cinématographiques réussies , ces deux films interrogent sur la société française : la précarité , mais aussi la volonté de lutter. C’est ce qui rend ces films intéressants et réussis.